ARTICLE GAGNANT
CATEGORIE "INDIVIDUEL"

L'ARTICLE DE MIRIAM ULMER
(35 - CHATEAUBOURG)

 

          Un enfant de dix ans qui pleure. Un enfant de dix ans recroquevillé sur le pas d'une porte. Un enfant de dix ans, dehors, dans le froid, sous la pluie, accroupi dans une mare de sang, le doigt coupé. Exclu sous prétexte, qu'il salit ! Une honte ? Un scandale !

          Comment une mère, un père, peuvent-ils traiter ainsi un enfant ? Un enfant comme le leur. Qu'a-t-il fait, le petit garçon, pour devoir tant souffrir ? Pour être si malheureux ? Pour être considéré, manipulé, exploité comme un animal ! Pire qu'un animal : un jouet que l'on jette s'il n'est plus amusant. Une poupée que l'on bat si on est en colère, que l'on blesse si on est triste. Que l'on vend comme si ce n'était personne ! Est-ce normal ? Un être en chair et en os, qui marche, qui parle, qui pleure ; qui voit, qui entend, qui comprend... qui ressent ! Est-il moins humain que nous ? Si vous avez des jumeaux, vous n'en choisissez pas un pour le décortiquer et en faire des pièces de rechange pour l'autre ! Et puis, comment le choisiriez-vous ? Au hasard peut-être ?!

          Bien sûr, plus besoin de se salir les mains à l'usine, plus besoin de risquer sa vie pour tourner un film, plus de jaloux si tout le monde sortait avec une Britney Spears ... mais quel ennui ! Pourquoi ne pas envoyer votre clone a la guerre, s'y faire tuer pour que vous puissiez vivre ? Mais pourquoi vous et pas lui ? C'est presque insupportable de voir le même être en deux exemplaires, mais si moralement différent.

          Yannick, le personnage de Gudule, ne connaît pas la souffrance, il vit dans le luxe d'une existence heureuse et gâtée. Ses parents l'aiment de tout cœur et laissent passer bon nombre de ses caprices. Le clone de ce même enfant sous le même toit est ignoré et battu. Il vit à côté de ce qui devrait être son père, sa mère et son frère mais est traité comme une machine. Une machine coûteuse mais remplaçable. Lorsqu'on se trouve face à ce scénario de l'horreur, on craque, on a envie de crier, de pleurer, de fermer le livre, d'oublier. Un monde dans lequel les individus vivent dans deux groupes, les uns ont des droits, les autres ont des devoirs. Ce monde est-il juste ? Les droits de l'homme ne garantissent-ils pas les libertés de chaque être humain tant qu'il respecte ceux de son concitoyen ? Pourquoi le sadisme, la négligence et la perversité des dieux modernes vis-à-vis des clones ne sont-ils donc pas punis par la justice ? Je suis bouleversée, je suis écœurée par ce qui ressemble a un possible futur et qui doit absolument être évité.

          Je suis absolument contre le clonage, que je trouve immoral et complètement insensé. Tout d'abord cela va contre toute éthique. L'homme a le pouvoir mais pas le droit de pratiquer cette expérience sur un de ses semblables, simplement par respect de ce dernier. Un individu est caractérisé par son unicité. Si l'on enlevait cette caractéristique, il ne resterait qu'une sorte de coquille semblable à tant d'autres. Imaginez-vous un monde peuplé de gens blonds aux yeux bleus, au nez droit, d'un mètre quatre-vingts. Où serait l'originalité, le mouvement, la surprise ? Qui serait qui ? Aucun menton volontaire ne désignerait un individu énergique, aucune couleur de cheveux serait typique pour une région. Aimeriez-vous vivre dans une telle conformité?

          Pour les couples stériles, il y a la possibilité d'adopter un des nombreux enfants abandonnés ou maltraités de la planète. L'espèce humaine n'est pas en voie de disparition : alors pourquoi vouloir augmenter son nombre ? Pour des raisons économiques ? Pour en faire des jouets, des prostituées, des soldats, ou découper leurs corps en pièces détachées ? Le clone issu de cette procédure, que deviendra-t-il ? C'est inadmissible qu'une société se permette de désigner des individus et de les juger plus bas que d'autres.

          Sur le plan médical, il serait effectivement intéressant de cloner, mais seulement des organes isolés que l'on garderait en culture dans un laboratoire pour effectuer des greffes et des expériences. Mais là encore, se pose l'essentielle question : où est la limite ? En principe, tant que la chose ne peut pas survivre en autonomie, on peut en faire ce que l'on veut, vu que sans nous elle n'existerait pas. C'est seulement si elle a la possibilité d'un fonctionnement autonome et peut ressentir et penser, qu'on ne devrait pas la créer de façon artificielle.

          Si l'humanité dénie l'humanité d'un autre être humain, elle perd son humanité.

Miriam ULMER
(née le 24/07/87)
35220 Châteaubourg