Tout ce que vous allez découvrir ci-après sur Leonard
Peltier a déjà été écrit, mais
je vous en offre un résumé en piochant dans diverses
références que vous trouverez à la fin de cette
postface.
Ce qui arrive à cet homme, comme malheureusement à
beaucoup d'autres, est aberrant.
Je parle en tant qu'être humain, en tant qu'individu révolté
par l'injustice.
Leonard Peltier est un Indien lakota anishnabe, incarcéré
depuis près de trente ans aux États-Unis pour un crime
qu'il n'a pas commis.
Il fut un des leaders de l'AIM (American Indian Movement),
une organisation créée en 1968 pour dénoncer
l'humiliation, la misère, l'acculturation et la dépossession
des Indiens d'Amérique, et pour attirer l'attention sur leurs
conditions de vie dramatiques, par des actions spectaculaires, mais
non violentes. L'AIM se bat contre l'alcoolisme, distribue de la
nourriture, crée des programmes d'autosuffisance, restaure
des activités religieuses traditionnelles, soutient la renaissance
des langues autochtones.
Le FBI, farouche opposant de l'AIM, considère cette organisation
comme subversive, et ses chefs comme des ennemis.
C'est pourquoi, dans les années 70, l'administration du président
Richard Nixon met en place un programme de contre-espionnage interne
pour infiltrer et déstabiliser les organisations dites "
subversives ", dont l'AIM. Une milice paramilitaire privée,
recevant secrètement armes et munitions sophistiquées
du FBI, est également créée : les Goon Squads
(Guardians of Oglala Nation).
Le FBI maintient sur les terres du peuple indigène ces
soldats, véritables escadrons de la mort.
Le gouvernement américain procède à de multiples
arrestations et accable le chef de l'AIM à l'aide de procès
truqués et d'emprisonnements arbitraires.
La violence et les tensions s'intensifient.
Pour protester contre les brutalités des Goon Squads,
les Sioux, aidés par des militants de l'AIM, occupent en
février 1973 le village historique de Wounded Knee. Leonard
Peltier participe à l'occupation. Les autorités assiègent
le village pendant trois mois, hésitant à donner l'assaut,
mais tuant deux Sioux.
En mai 1973, les assiégés se rendent après
avoir exigé que des négociations s'ouvrent sur les
traités violés et les conditions de vie des Indiens,
mais les Goon Squads intensifient leur action et s'en prennent
aux opposants dans les mois qui suivent, avec l'accord du gouvernement.
Une vague de terreur s'abat sur la population indigène dans
la réserve indienne de Pine Ridge (État du Dakota
du Sud) : quatre-vingt militants du mouvement AIM sont assassinés
entre novembre 1973 et fin 1975.
Dans un entretien réalisé pour le Boulder Weekly
en mars 2000, Ben Corbett pose la question suivante : " Je
sais que vous l'avez répété des milliers de
fois, mais à quoi ressemblait la pression qui existait sur
Pine Ridge en 1975 ? " Voici ce que Leonard Peltier répond
: " Je raconte cela sans discontinuer depuis vingt-quatre ans.
Je ne peux que répondre comme je l'ai toujours fait. Il y
avait un règne de terreur qui était imposé
au peuple oglala lakota par son propre gouvernement tribal. Nous
savons maintenant qu'il y a un organisme [NDT : la Commission sur
les droits civiques des États-Unis] au sein du gouvernement
américain qui a mené des investigations et qui, avant
d'arriver à ses conclusions, avait déjà enquêté
sur soixante-quatre décès qui ont été
imputés à la milice des Goons de Dick Wilson.
Les gens vivaient dans la peur. Ils vivaient dans une terreur constante.
C'était comme ça. " (1)
Aucune enquête ne sera menée sur tous ces agissements
illégaux.
Un matin de juin 1975, tout bascule
La propriété dans laquelle les militants de l'AIM,
dont Leonard Peltier, se sont établis va se retrouver cernée
par des Goon Squads, des agents du FBI et une foule de policiers.
Une fusillade éclate de tous côtés : deux agents
du FBI sont découverts morts.
Une gigantesque campagne médiatique tente de criminaliser
le mouvement indien. La répression règne dans toutes
les réserves. Quatre mandats d'arrêt sont lancés,
dont un contre Leonard Peltier, accusé d'avoir assassiné
les deux agents du FBI.
À partir de là, tout n'est que mensonges et corruption
: faux témoignages, fausses déclarations, fausses
preuves, changement de chef d'inculpation en cours de route, etc.
Le FBI se rend coupable de parjure, de subornation de témoins
et de la falsification d'une expertise balistique.
En 1977, Leonard Peltier est condamné à la double
peine de prison à vie alors qu'il n'y a aucune preuve contre
lui. En 1992, le procureur Lynn Crooks reconnaît même
que le gouvernement américain ne sait pas qui a tué
ses deux agents.
En 1993, les avocats de Leonard Peltier déposent une demande
de grâce présidentielle à la Maison Blanche,
grâce qui demande habituellement un délai de réponse
de six à neuf mois
cela fait dix ans, maintenant.
Étant donné que Leonard Peltier est incarcéré
depuis plus de vingt-cinq ans, il entre dans le processus de libération
conditionnelle. La commission a arbitrairement rejeté sa
demande à 2008 !
Aujourd'hui, malgré la pression et le soutien du Congrès
national des Indiens d'Amérique, le Conseil national des
Églises, Amnesty International, etc., Leonard Peltier ne
peut donc obtenir ni la liberté conditionnelle ni une grâce
présidentielle.
Leonard Peltier vit dans des souffrances physiques extrêmes.
Il a failli mourir en 1993 dans un hôpital pénitentiaire,
au cours d'une opération bénigne de la mâchoire.
En sortant du coma, il a été placé dans une
cellule infestée d'insectes. Depuis cette intervention chirurgicale,
il a la mâchoire bloquée. Les instances pénitentiaires
refusent de lui accorder des soins.
Il souffre également de problèmes cardiaques et de
diabète. Il a perdu une grande partie de ses facultés
visuelles.
Selon Sylvain Duez-Alesandrini, partisan du Comité de solidarité
avec les Indiens des Amériques et coordinateur européen
du Comité de défense de Leonard Peltier : " Il
est donc reconnu qu'il est torturé pour raisons politiques.
" (2)
L'opinion publique et de nombreuses organisations luttent à
ce jour pour la révision du procès de Leonard Peltier.
L'ethnologue Jean-Marc Bertet écrit dans le Monde diplomatique
: " Car il apparaît de plus en plus que le véritable
crime de Leonard Peltier est d'être un Indien et d'avoir eu
le tort de défendre les droits essentiels de ces peuples
premiers avec lesquels l'Amérique n'a pas encore réglé
sa dette historique. [
] Ce combat est celui de la dignité
volée à un homme, en raison de son engagement politique
et de son origine ethnique. " (3)
J'espère que ce résumé vous a éclairé
sur Leonard Peltier et sur ce qu'il subit. Nous sommes au XXIe siècle
et l'être humain est toujours aussi barbare et irrespectueux
envers son semblable
Pour aller plus loin
Lire
Écrits de prison, de Leonard Peltier (Albin Michel, 2000),
ouvrage préfacé par Danielle Mitterrand, qui a rendu
visite à Leonard Peltier dans sa cellule.
Les éditions Albin Michel ont décidé de reverser
l'intégralité des bénéfices réalisés
par la vente du livre au Comité de défense de Leonard
Peltier (LPDC).
Site où vous trouverez un extrait du livre :
http://www.cnt-2eme-ur.org/HTML/DOSSIERS/JamalPeltier/dossierpeltier.html
Liens
(1) Entretien
avec Leonard Peltier réalisé par Ben Corbett,
journaliste américain, paru dans l'hebdomadaire Boulder Weekly
la semaine du 9 au 15 mars 2000 : Caged Warrior (" Un guerrier
en cage "). L'entretien restitue bien le contexte et les circonstances
qui sont à l'origine de la condamnation et de l'incarcération
arbitraires de Leonard.
(2)
Interview de Sylvain Duez-Alesandrini (février 2000)
.
(3) Article
paru dans le Monde diplomatique (décembre 2002) .
Intervention
de Jean Day, membre du Comité de défense de Leonard
Peltier (LPDC, Kansas) et de l'AIM, à Vincennes .
Communiqué
du Comité de défense de Leonard Peltier :
Agir
CSIA (Comité de soutien aux Indiens d'Amérique)
21 ter, rue Voltaire, 75011 Paris
Tél. : 01 43 73 05 80 www.csia-nitassinan.org
Site
de la pétition.
De nombreux sites en anglais sont à votre disposition, et
d'autres en français, que je n'ai pas répertoriés.
Nathalie Le Gendre, le 23 décembre 2003